Comprendre les Résistances : Le Guide Complet (1/2)

Bienvenue dans le deuxième article de la série « Fondations ». Dans cet article, nous nous pencherons sur l’une des premières briques de bases des montages électroniques… J’ai nommé la résistance !

Selon Clint Eastwood, il n’existe que deux catégories de matériaux : les gentils conducteurs qui tiennent le pistolet et les méchants isolants qui creusent. Cependant, le gourou du Yin-Yang nous annonce que la vraie vérité se situe toujours entre les deux… Et il a bien raison. Tous les matériaux sont conducteurs: il y a des matériaux qui sont très conducteurs, d’autres qui le sont un peu moins, tandis que certains sont carrément récalcitrants. Prenons l’air par exemple, a priori il est isolant (et heureusement sinon on se prendrait une châtaigne devant chaque prise murale)… Mais en fait, pas vraiment : lors de la foudre, il y a une différence de potentiel si forte entre le ciel et la terre que l’air devient conducteur, permettant ainsi à l’électricité de circuler et d’équilibrer les inégalités de charges… Faut dire que la nature est plutôt de gauche !

foudre

Par conséquent, au lieu de parler de conducteur ou d’isolant, il convient plutôt de parler de capacité à résister au passage de l’électricité, ou simplement de résistance. Cette valeur peut être nulle (aucune résistance au passage des électrons) ou très grande (forte résistance).

Dans cet article, nous allons disséquer ce composant de base. Mon objectif ici n’est pas de nous perdre dans les détails physiques inutiles et écrasants. Non, ce que je veux, c’est aborder suffisamment de détails pour cultiver notre compréhension haut niveau de ce composant.

Trop long; Pas lu:
Je sais que votre temps est précieux, voici un résumé de cette article sous forme de points clés:
– La résistance est un composant électronique de base qui limite le passage des électrons dans un circuit, selon la loi d’Ohm. 
– La valeur d’une résistance dépend de sa conductivité, de son épaisseur et de sa longueur. Les résistances sont disponibles dans des valeurs normalisées.
– Il existe deux principaux types de résistances: les résistances axiales et les résistances CMS (composant monté en surface). 
– La valeur d’une résistance axiale est indiquée par un code couleur, tandis que la valeur d’une résistance CMS est directement imprimée.
– Lorsqu’une résistance est parcourue par un courant, elle dissipe de l’énergie sous forme de chaleur. Sa puissance nominale dépend de sa capacité à dissiper la chaleur.
– La résistance varie légèrement avec la température: elle augmente pour les conducteurs et diminue pour les semi-conducteurs.
– Un multimètre en mode résistance permet de mesurer facilement la valeur d’une résistance.

Comment ça marche?

Propriété 1: résistance et loi d’Ohm

Imaginez l’électricité circulant à travers un fil comme le trafic sur une autoroute. Souvent, nous voulons contrôler la quantité d’électricité qui circule sur notre circuit, tout comme nous pourrions vouloir réguler le débit de voitures sur une route en présence de travaux.

Imaginez-vous une résistance comme une série de plots de chantier sur la route. Ces obstacles limitent ainsi le nombre de voitures pouvant circuler, tout comme une résistance limite le nombre d’électrons pouvant circuler à travers notre circuit. Cela garantit que le flux reste sûr et gérable.

Je n’ai pas trouvé de meilleure analogie, mais il est important de noter que celle-ci a des limites. On serait amené à croire à tort que la résistance ralentit les électrons. En réalité, les électrons continuent de circuler à la même vitesse, qu’il y ait une résistance ou non. La résistance ne modifie pas la vitesse des électrons ; elle restreint simplement leur quantité.

Retournons à notre joyeux chaos routier : tandis que vous zigzaguez avec virtuosité entre les cônes VLC, vous pouvez vous demander s’il serait envisageable d’estimer le nombre de véhicules parcourant l’autoroute en fonction de la dispersion de ces précieux plots de signalisation.

Là c’est le moment de faire ressurgir les vieux souvenirs du lycée : la loi d’Ohm. Il s’agit d’une règle fondamentale en électronique, nommée d’après Georg Simon Ohm. Cette loi établit une relation entre la tension, le courant et la résistance dans un circuit électrique.

Georg Simon Ohm à la sortie de la fac

La résistance, notée R, est mesurée en ohms (\Omega) et est reliée à la tension et au courant traversant le matériau par la loi d’Ohm, exprimée par l’équation (U = R \times I). Cela signifie que la tension (U) aux bornes d’un composant est égale au produit de sa résistance (R) et du courant (I) qui le traverse. Jusqu’à preuve du contraire, R est toujours un nombre positif. Dans un univers idéal, lorsqu’un matériau est un conducteur parfait, c’est-à-dire lorsqu’il permet le passage du flux d’électrons sans aucune résistance, sa résistance est nulle (R = 0). À l’autre extrême, lorsque le matériau est un isolant parfait, c’est-à-dire qu’il ne permet pas le passage du courant, la résistance est infinie (R = +\infty).

Propriété 2: puissance nominale

Quand on parle de résistance, il est crucial de bien saisir le concept de dissipation thermique, surtout quand on manipule des composants susceptibles de chauffer rapidement. Pour illustrer ça, imaginez les électrons comme de minuscules marathoniens dévalant une savane d’ortie symbolisant les atomes du conducteur. Plus les électrons touchent les atomes, plus il y a de friction, et plus ça va chauffer.

Techniquement, c’est exactement ce qui se passe dans une ampoule à incandescence. À l’intérieur, il y a un filament en tungstène, suffisamment mince et long pour présenter une résistance spécifique. Lorsque ce filament est traversé par du courant électrique, il chauffe tellement qu’il entre en incandescence, produisant de la lumière. Heureusement, comme le filament est dans un milieu pauvre en oxygène, il ne brûle pas. Cependant, cette situation montre clairement une limite fondamentale de n’importe quelle résistance : sa capacité à dissiper la chaleur sans se volatiliser.

D’après la loi d’Ohm, lorsqu’une résistance est soumise à une tension et qu’elle laisse passer un courant, elle consomme toujours de l’énergie électrique. Cette énergie consommée, qui se transforme en chaleur, est calculée en effectuant un petit jonglage : P=U \times I = R \times I \times I = R \times I^2 ou encore P=\frac{U}{R}.

Cette dissipation thermique les amis, c’est une notion cruciale lorsqu’on se lance dans la conception de circuits électroniques. Elle nous permet de choisir la résistance dotée de la capacité de dissipation thermique appropriée, sans risque d’incendier l’atelier!

Anatomie

Extérieur

Les résistances axiales ou traversantes

L’une des plus reconnaissables et omniprésentes des résistances est celle que l’on appelle la résistance axiale ou traversante. Si vous avez déjà ouvert un appareil électronique, vous avez probablement remarqué ces petits composants de forme cylindrique, avec deux fils métalliques sortant de chaque extrémité:

Exemple de résistances axiales

L’une des caractéristiques les plus importantes à comprendre concernant les résistances axiales est que leur taille peut varier en fonction de leur capacité à dissiper la chaleur thermique. Plus la résistance est balèze, plus elle sait gérer la surchauffe. En d’autres termes, plus elle a de la matière, plus elle peut absorber et rayonner cette puissance thermique. Jetez un oeil sur ce schéma pour vous faire une idée de comment la taille joue sur la pouvoir de dissipation d’une résistance :

Dissipation maximale des résistances en fonction de leur taille

Une autre particularité de ces grandes résistances est qu’elles sont accompagnées d’anneaux de différentes couleurs. Ces couleurs ne sont pas là pour faire joli ; c’est un code « secret » qui permet la détermination de la valeur de la résistance. En combinant les couleurs selon un code couleur spécifique, les fabricants font kiffer les ingénieurs et les bricoleurs du dimanche sans avoir même à sortir le matos de mesure. Plus de détails plus tard.

Composant monté en surface (CMS)

Les résistances CMS ont fait leur apparition bien après les résistances traversantes traditionnelles.

Quelques exemples de résistances montée en surface et leur taille

Comparativement aux résistances traversantes, les résistances CMS présentent plusieurs avantages. Tout d’abord, leur taille réduite permet une occupation plus efficace de l’espace sur la carte électronique. Une autre caractéristique distinctive des résistances CMS est la présence de chiffres ou de codes imprimés sur leur surface. Comme nous le verrons plus loin, ces codes indiquent la valeur de la résistance, ce qui facilite grandement leur identification lors de l’assemblage et du dépannage.

D’un point de vue performance, les résistances CMS écrasent carrément leurs potes traversantes en matière de précision et de tolérance. Parfaites pour les circuits de précision. Mais attention, tout est une question de compromis dans la vie… Leur taille réduite, c’est top pour l’encombrement, mais ça limite leur capacité à dissiper la puissance.

Intérieur

On a dit qu’il existe différentes valeurs de résistance, allant de quelques ohms à plusieurs mégaohms. Mais comment obtenons-nous ces différentes valeurs ? En réalité, la résistance d’un matériau conducteur au passage du courant dépend de trois caractéristiques principales :

  • sa conductivité, qui représente sa capacité à permettre le passage du courant électrique, dépend de sa nature physique. Par exemple, l’or présente une meilleure conductivité que le cuivre.
  • son épaisseur: plus un matériau est épais, moins il résiste au flux d’électrons, car ces derniers sont répartis sur une plus grande section. En revanche, un matériau plus mince offre une résistance plus élevée, comme on peut le constater avec le filament de l’ampoule à incandescence
  • Enfin, sa longueur : plus il est long, plus il y a de frictions qui entravent le mouvement des électrons, augmentant ainsi sa résistance.
Illustration de l’intérieur d’une résistance. On vient bien le conducteur en spirale qui tourne autour d’un noyau

Grâce à ces trois propriétés et à la loi d’Ohm, nous pouvons calculer la résistance R en fonction de la conductivité, de la longueur et de la section transversale du matériau. Cette relation est exprimée par l’équation suivante:

R = \rho \frac{L}{A}

On voit bien donc que la résistance (R) d’un matériau augmente avec sa longueur (L) et diminue avec l’aire de sa section (A).

Quant au \rho, les différents matériaux présentent des résistivités très différentes. Cette disparité peut être visualisée dans le tableau comparatif suivant:

Examples de conductivité électrique de plusieurs conducteurs. (Référence: Dalmijn, W. et al. « The impact of the combination of technology, legislation and economy on the resource cycle« . IMPC 2003)

Mesurer une résistance

Vous pensez peut-être que mesurer une résistance, c’est sans prise de tête? Laissez-moi vous dire un truc : dans certains secteurs, la température, c’est pas juste une question de confort ! La chaleur, c’est exactement l’agitation des molécules: en gros, plus il fait chaud, plus ça s’excite dans tous les sens. Résultat: pour les conducteurs, la vitesse thermique des électrons augmente, les électrons libres entrent plus fréquemment en collision avec les molécules du conducteur, et cela entraîne une augmentation de la résistivité.

Pour les mauvais conducteurs, par exemple les semi-conducteurs, c’est l’inverse qui se passe. Lorsque la température augmente, l’agitation thermique fait que le nombre d’électrons en agitation augmente. Par conséquent, la densité des charges qui peuvent se déplacer dans le semi-conducteurs augmente, et donc la résistivité diminue (pour aller plus loin ici)

Illustration de la variation de la résistivité en fonction de la température pour les conducteurs (gauche) et les semi-conducteurs (droite)

Un exemple concret que vous avez sans doute rencontré est celui du zéro absolu (0 Kelvin). À cette température, la résistance tend vers zéro, créant ainsi ce que l’on appelle un état de supraconductivité. Les électrons se déplacent sans aucune friction…en parfaite harmonie avec la nature du conducteur…tel un maître shaolin au mileu d’une tornade !

Alors bon, en tant que bidouilleurs, on n’a pas notre labo perché sur le balcon de l’ISS, ni dans un hammam. Donc, pour nos besoins, nous pouvons négliger ces cas extrêmes et nous concentrer sur le quotidien du commun des mortels!

Pour terminer, lorsqu’il s’agit de résistances en électronique, il n’y a pas de valeurs à tout bout de champ. Imaginez un instant s’il existait une résistance pour chaque valeur possible… La diversité serait immense, et cela compliquerait considérablement les processus industriels. C’est pourquoi nous avons ce que l’on appelle des « valeurs normalisées » de résistance, qui sont des valeurs spécifiques rencontrées plus fréquemment que d’autres.

Les résistances axiales

En ce qui concerne les résistances axiales, leur valeur peut être déterminée en lisant les couleurs des anneaux sur leur surface externe. Bien que cette méthode soit le truc à l’ancienne du genre « c’était mieux avant », soyons clairs, c’est pas super fun. Et puis, sérieux, est-ce qu’on pense un peu aux daltoniens ?

Donc, voilà, on va pas se prendre la tête avec ça ici. Mais bon, j’ai concocté une illustration synthétique bien sympathique au cas où vous seriez du genre nostalgique ou si vous tombez sur ce blog après l’effondrement de la civilisation :


Code des couleurs pour les résistances axiales selon la norme CEI-60757 et CEI-60063

Les résistances CMS

Pour les résistances CMS, c’est plutôt fastoche. Ici, les valeurs sont juste imprimées sur leur surface. Enfin, je dis bien « presque ». Les deux ou trois premiers chiffres du code indiquent la valeur de la résistance, tandis que la chiffre suivant représente le facteur de multiplication. De plus, une lettre « R » est ajoutée pour indiquer la position de la virgule lorsque nécessaire. Rien de tel qu’un petit schéma pour résumer tout cela:

Marquage des résistances CMS

Ohmmètre

Laissez-moi vous poser une question : qui a envie de se prendre la tête à déchiffrer des codes de couleur ou à plisser les yeux devant des gribouillages ?… Exactement, personne !

Aujourd’hui, tout ce dont vous avez besoin, c’est d’un multimètre Lidl. Tous les multimètres modernes ont une position dédiée pour mesurer la résistance. Vous voyez cette petite icône qui ressemble à un gros ventre avec des petits pieds (\Omega)? Oui, c’est ça ! C’est par là que la magie se produit.

Il suffit de choisir ce mode, puis de connectez les pointes du multimètre de chaque côté. Vous verrez la valeur de la résistance qui s’affiche sur l’écran. Easy peasy !

Conclusion

Dans cet article, nous nous sommes plongés un peu dans les tréfonds de la résistance. Nous avons exploré ces petits composants d’apparence très basique et avons compris leur fonctionnement. Dans le prochain article, nous irons plus loin dans la pratique. Nous allons explorer comment intégrer la résistance dans des montages et comment elles sont utilisées.

En attendant, sachez que vos réflexions, questions, même vos idées les plus folles, alimentent notre quête commune. Alors, n’hésitez pas à partager tout dans les commentaires, tout ce qui vous passe par la tête.

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